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Décompte, réserves et réalisation des travaux réparatoires aux frais et risques du titulaire

Principes applicables

  • L’unicité du décompte : le décompte général et définitif récapitule l’ensemble des éléments actifs et passifs résultant des obligations des cocontractants. Le Conseil d’Etat a posé le principe aux termes duquel, « l’ensemble des opérations auxquelles donne lieu l’exécution d’un marché de travaux publics est compris  dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors de l’établissement du décompte définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties »  (CE 8 décembre 1961, Société Nouvelle Compagnie générale des travaux, p. 701 ; 20 mars 2013 n° 357636).

Il en résulte que toutes les conséquences financières de l’exécution du marché sont retracées dans ce décompte même lorsqu’elles ne correspondent pas aux prévisions initiales. 

Lorsque des réserves ont été émises lors de la réception et n’ont pas été levées, il appartient au maître d’ouvrage d’en faire état au sein de ce décompte. À défaut, le caractère définitif de ce dernier a pour effet de lui interdire toute réclamation des sommes correspondant à ces réserves (CE 6 novembre 2013 n° 361837, sauf à ce que le maitre d’ouvrage n’ait pas eu la capacité d’assortir le décompte de réserves CE 15 novembre 2012 n° 349107). 

Les réserves ainsi mentionnées dans le décompte peuvent être chiffrées ou non (CE 6 mai 2019, n° 420765 et article 12.4.2 CCAG travaux).

Lorsque les réserves sont mentionnées dans le décompte sans être chiffrées, celui-ci ne devient définitif que sur les éléments n’ayant pas fait l’objet de réserves. Lorsque le maître d’ouvrage chiffre le montant de ces réserves dans le décompte et que ce montant n’a fait l’objet d’aucune réclamation de la part du titulaire, le décompte devient définitif dans sa totalité, les sommes correspondant à ces réserves pouvant être déduites du solde du marché au titre des sommes dues au titulaire au cas où celui-ci n’aurait pas exécuté les travaux permettant la levée des réserves. 

  • L’article 41.6 du CCAG travaux permet au maître d’ouvrage de faire exécuter aux frais et risques du titulaire les travaux ayant fait l’objet de réserves lors de la réception qui n’ont pas été levées dans le délai imparti au titulaire pour ce faire.

Le Conseil d’État précise ici que rien n’oblige le maitre d’ouvrage à le faire avant l’établissement du décompte général. 

L’espèce

La commune de Sainte-Flaive-des-Loups a entrepris en 2011 des travaux de transformation d’une grange en bibliothèque. Elle a attribué le lot n° 1 ” démolition – gros œuvre ” du marché à la société X par un acte d’engagement du 3 novembre 2011. La réception de l’ouvrage a été prononcée sous réserve de l’achèvement de certaines prestations, dont celles relatives à la finition de l’enduit traditionnel extérieur. Dans le décompte général transmis à la société X, la commune a notamment déduit du montant du marché une somme de 17 979,64 euros TTC au titre de la finition de l’enduit traditionnel extérieur. Contestant ce décompte, la société X a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Sainte-Flaive-des-Loups à lui verser le solde de ce décompte, d’un montant de 26 462,18 euros TTC, assorti des intérêts moratoires et de leur capitalisation. Par un jugement du 19 juin 2019, le tribunal administratif a fait droit à cette demande. Par un arrêt du 8 janvier 2021, contre lequel la commune se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté son appel contre ce jugement.

Les juges du fond estimaient que la commune aurait dû faire réaliser les travaux réparatoires des réserves non levées avant l’établissement du décompte.

Le Conseil d’État censure cette analyse : “en jugeant que malgré l’inscription dans le décompte général et définitif d’une somme correspondant aux travaux ayant fait l’objet de réserves non levées, la commune maître d’ouvrage ne pouvait se prévaloir d’une créance correspondant à cette somme à l’encontre du titulaire au motif que ces travaux n’avaient pas été réalisés, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit“.

Sources :

Conseil d’État, 7ème – 2ème chambres réunies, 28 mars 2022, n°450477 https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000045431818?init=true&page=1&query=450477&searchField=ALL&tab_selection=all

Conclusions de Madame Mireille Le Corre, rapporteure publique http://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CRP/conclusion/2022-03-28/450477

CCAG Travaux https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000043310421/2022-05-09/